AVENUE 69, Le blog GAY BIS de philippe2belgique
FRANCE:
«Les petits homos qui crèvent dans la rue, tout le monde s’en fout»
INTERVIEW. Jean-Marie Périer publie «Casse-toi!», livre dans lequel il recueille des témoignages de jeunes homos mis à la rue, est sorti cette semaine. Le célèbre photographe nous fait part de son émotion à la découverte de leurs histoires.
Jean-Marie Périer (au centre), avec un militant de l'association Le Refuge et le livre «Casse-toi!».
TÊTU: Comment ce livre est-il né?
Si chaque histoire est différente, les parcours des ados que vous avez rencontrés comportent de nombreux points communs…
La plupart de leurs familles sont très ancrées dans la religion et la tradition, qui leur a bousillé l’esprit. Elles considèrent les homos comme de dangereux déviants, leur enfant devient d’un coup une sorte d’elephant man. L’homosexualité est pour elles intolérable.Dans la rue, chacun des jeunes a été confronté aux mêmes problèmes, à la violence, à la mendicité. Beaucoup sont tombés dans la drogue et ont dû se prostituer. Ce parcours est malheureusement classique. Comment peut-on s’en sortir quand on se retrouve, du jour au lendemain, SDF à 15 ans? Ils gardent d’ailleurs tous un souvenir très précis de leur première nuit dehors.
Après de telles descentes aux enfers, dans quel état d’esprit sont ces jeunes?
Je pense qu’ils s’en sortiront, ils ont des projets, des envies. Eux ont fait le chemin, ils ont contacté l’association au bon moment. Mais ils ne sont que la partie immergée de l’iceberg, ce sont tous les autres, qui sont sans doute des milliers, qui m’inquiètent. Mais ces mômes pensent comme des adultes qui ont déjà tout vécu, ils ont commencé par la fin. Ils ne sont plus capables d’aimer, ni même de faire confiance. L’autre est l’ennemi. A partir du moment où vos parents vous renvoient et vous trahissent, on ne peut plus avoir confiance en personne.Qu’est ce qui vous a le plus marqué dans ces rencontres?
Une extrême violence. Ces mômes sont en danger: l'un, son père veut l’égorger, l’autre lui tirer dessus, un autre l’enterrer vivant. Ce sont des parcours qui comptent des problèmes sociaux très graves. Mais une histoire m’a encore plus effrayé, celle d’une jeune fille qui n’est pas menacée de mort. C’est à cause du silence qui s’installe entre elle et sa famille qu’elle se retrouve à la rue. C’est une histoire sans histoire, qui se termine comme les autres, dehors. Le non dit s’installe et c’est terminé. On l’a niée. Ce sont sans doute les cas les plus nombreux.
Dans le livre, vous vous positionnez souvent en tant que père. Quel regard portez-vous sur ces parents?
Jean-Marie Périer, Casse-toi!, Oh éditions, 14,90€.